Les voyages Organisés

J’ai souvent comparé la villégiature

Aux phases d’un voyage entrepris en commun

Avec des étrangers de diverse nature

Dont on n’a de ses jours vu ni connu pas un.

Au début de la route, en montant en voiture

On s’observe: l’un l’autre on se trouve importun

L’entretien languissant meurt faute de pâture

Mais, petit à petit, on s’anime, et chacun

A l’entrain général à son tour s’associe

On cause; on s’abandonne, et plus d’un s’apprécie

Le conducteur cependant roule sans s’arrêter

Jusqu’au site que l’on doit visiter

Et c’est lorsqu’on commence à se connaitre

Que l’on se juge mieux, qu’on s’aimerait peut-être

C’est alors que le voyage se termine

Et qu’il faut se quitter.

Le Jour et la Nuit

La nuit n’est plus pénible

Enveloppée dans les nuages

Elle se remet du jour et de la tristesse

Dans son sillage, les orages, les pluies blessent

Se défient les oiseaux volages

Sombres et volubiles.

Pourtant c’est bien là que l’on rêve

C’est dans cet air , que se jouent les meilleures trêves

Qui apaisent et qui intègrent

Les éclaircies ne se voient guères

Mais il est sûr tout sourit

Dans le jour se cache la belle nuit.

La force du mental

L’ivoire des dents

Ne craint pas le feu

L’usure du temps

Ne rend pas malheureux

Le reste du corps

Se calcine

Le rêve revigore

Quand, contre le réel

L’on se mutine

Sur ce bateau

En proie au tangage

Demeurent les lambeaux

D’un autre langage

Celui que connaissent

Les fraternels oiseaux

Avant la détresse

Les affres du tombeau.

Quel est ce chant ?

Beau est le monde malgré la nuit

Secrète ta propre lumière intense

Malgré l’opacité du silence

Il y aura toujours éphémère cette chance

De se nourrir d’espérance

Ni la démence ni le sang

Avec la laideur et leurs transes

N’éteindront le chant

De l’oiseau au soleil levant

Penseurs

Puisque les plus heureux ont des douleurs sans nombre

Puisque les nuits sont froides, puisque les cieux sont lourds

Puisque l’homme ici-bas promène son cœur sombre

Parmi les vains regrets et les courtes amours

Que faire de la vie ? Ô notre âme immortelle

Où jeter tes désirs et tes élans secrets ?

Tu voudrais posséder, mais ici tout chancelle

Tu veux aimer toujours, mais la tombe est si près !

Le meilleur est encore en quelque étude austère

De s’enfermer, ainsi qu’en un monde enchanté

Et dans l’art bien aimé de contempler sur terre

Sous un de ses aspects, l’éternelle beauté.

Penseurs, au front serein, vous l’avez su comprendre

Vous qu’entre tous les arts le plus doux captiva

Qui l’entourez de foi, de culte, d’amour tendre

Lorsque la foi, le culte et l’amour, tout s’en va.

Ah ! tandis que pour nous, qui tombons de faiblesse

Et manquons de flambeau dans l’ombre de nos jours

Chaque pas a sa ronce où notre pied se blesse

Dans votre frais sentier marchez, marchez toujours

.

Marchez ! pour que le ciel vous aime et vous sourie

Pour y songer vous-même avec un saint plaisir

Et tromper, le cœur plein de votre idolâtrie

L’éternelle douleur et l’immense désir.

Ô Mon Dieu

Je n’ai que moi

En chaque jour

Pour accueillir l’aube nouvelle

Mais dès qu’au songe je m’attèle

Je n’ai que Toi

Je n’ai que moi

Pour encaisser

De toute la vie les escarres

Mais dès qu’en rêve je m’égare

Je n’ai que Toi

Je n’ai que moi

Lorsque j’épie

De l’avenir l’heure qui chante

Mais dans mes prières ardentes

Je n’ai que Toi

Je n’ai que toi

pour m’éblouir

Et embellir les images

Mais dès que j’ai tourné les pages

Je n’ai que Moi

A mon Départ

Demain dans une belle boite sera glissée

Mon enveloppe charnelle

De la- haut je regarde

Des humains continuent de s’entretuer

Pour prouver l’existence d’un destinataire

Certains croient l’avoir trouvé

Au cimetière

D’autres recueillent des cendres dans une urnes

J’aime cette terre

Mais bientôt je ne pourrai plus rentrer chez moi

L’on m’aura volé les clés de l’existence

Chaque vie est un exil silencieux

d’où parfois la nécessité d’une voie différente

Qui retentit dans l’illusion de nos cieux

Contrôle de le parole

Tu ne peux le comprendre et ta bouche blasphème

Porte moins haut l’audace et connais-toi toi-même !

Le Mal est fils de l’homme et de sa volonté

Cet arbre aux fruits mortels s’ouvrit sur la nature

Du jour où l’Eternel fit à sa créature

Le présent de le liberté.

L’homme, hélas ! en a mal usé : voilà son crime !

Du superbe et du fort, du faible qu’on opprime

Un jour Dieu jugera l’orgueil et les douleurs

Humble, à tes malheurs même il faut donc te soumettre

Toi qui dois rendre compte à ton souverain maître

Du trésor amer de tes pleurs.

Pensée

Par mon amour et ma constance

J’avais cru fléchir ta rigueur

Et le souffle de l’espérance

Avait pénétré dans mon cœur

Mais le temps, qu’en vain je prolonge

M’a découvert la vérité

L’espérance a fui comme un songe

Et mon amour seul m’est resté !

Il est resté comme un abîme

Entre ma vie et le bonheur

Comme un mal dont je suis victime

Comme un poids jeté sur mon cœur !

Pour fuir le piège où je succombe

Mes efforts seraient superflus

Car l’homme a le pied dans la tombe

Quand l’espoir ne le soutient plus

J’aimais à réveiller la lyre

Et souvent, plein de doux transports

J’osais, ému par le délire

En tirer de tendres accords

Que de fois, en versant des larmes

J’ai chanté tes divins attraits !

Mes accents étaient pleins de charmes

Car c’est toi qui les inspirais

Ce temps n’est plus, et le délire

Ne vient plus animer ma voix

Je ne trouve point à ma lyre

Les sons qu’elle avait autrefois

Dans le chagrin qui me dévore

Je vois mes beaux jours s’envoler

Si mon œil étincelle encore

C’est qu’une larme va couler !

Brisons la coupe de la vie

Sa liqueur n’est que du poison

Elle plaisait à ma folie

Mais elle enivrait ma raison

Trop longtemps épris d’un vain songe

Gloire ! amour ! vous eûtes mon cœur

O Gloire ! tu n’es qu’un mensonge

Amour ! Tu n’es point le bonheur !