Hé quoi ! tu es étonnée
Qu’au bout de de mes quatre-vingt onze hivers
Ma muse faible et surannée
Puisse encor fredonner des vers ?

Quelquefois un peu de verdure
Rit sous l’averse dans nos champs
Elle console la nature
Mais elle sèche en peu de temps

Un oiseau peut se faire entendre
Après la saison des mauvais jours
Mais sa voix n’a plus rien de tendre
Il ne chante plus ses amours.

Ainsi je touche encor ma lyre
Qui n’obéit plus à mes doigts
Ainsi j’essaie encor ma voix
Au moment même qu’elle expire.

Pour mes derniers adieux mes amis
Quand on sent qu’on va passer
Quand l’âme fuit avec la vie
Dans ce moment chacun ne peut oublier

Tout ce qu’il a fait en santé
Quel mortel s’est jamais flatté
D’un rendez-vous à l’agonie ?
Pas facile la vie !

Si tu voulais pleinement me revoir
Tu saurais proposer une clé à ce puzzle
Donner un peu de lumière quand il fait trop noir
Et décider d’aller plus loin que sur le seuil.
