SAVOIR VIEILLIR

Vieillir, se l’avouer à soi-même et le dire

Tout haut, non pas pour voir protester les amis,

Mais pour y conformer ses goûts et s’interdire

Ce que la veille encore on se croyait permis.

 

Avec sincérité, dès que l’aube se lève,

Se bien persuader qu’on est plus vieux d’un jour

A chaque cheveu qui tombe, se séparer d’un rêve

Et lui dire tout bas un adieu sans retour

 

Aux appétits grossiers, imposer d’âpres jeûnes,

Et nourrir son esprit d’un solide savoir,

Devenir bon, devenir doux, aimer le Jeunes

Comme on aima les fleurs, comme on aima l’espoir.

 

Se résigner à vivre un peu sur le rivage

Tandis qu’ ils vogueront sur les flots hasardeux

Craindre d’être importun, sans devenir sauvage

Se laisser ignorer tout en restant près d’eux.

 

Vaquer sans bruit aux soins que tout départ réclame,

Prier et faire un peu de bien autour de soi

Sans négliger son corps, parer surtout son âme

D’une chaleur, et d’une antique Foi

 

Puis un jour s’en aller, sans trop causer d’alarmes

Discrètement mourir, un peu comme on s’endort

Pour que nos Amours et Amis ne versent pas de larmes

Et qu’ils sachent rester fort.

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