La tranquille Habitude aux mains silencieuses
Panse, de jour en jour, nos plus grandes blessures ;
Elle met sur nos coeurs ses bandelettes sûres
Et leur verse sans fin ses huiles oublieuses.
Les plus nobles chagrins, qui voudraient se défendre,
Désireux de durer pour l’amour qu’ils contiennent,
Sentent le besoin cher et dont il s’entretiennent
Devenir, malgré eux, moins farouches et plus tendres.
Et chaque jour, les mains endormeuses et douces,
Les insensibles mains de la lente Habitude
Resserrent un peu plus l’étrange quiétude
Où le mal assoupi se soumet et s’émousse.
Et du même toucher dont elle endort la peine,
Du même frôlement délicat qui repasse
Toujours, elle délustre, elle éteint, elle efface,
Comme un reflet, dans un miroir, toute peine.